
Juan de Echevarría – Juan Ramon Jimenez – 1918 – Musée de Bellas Artes de Álava
Il y a deux maîtres, disait Garcia Lorca : Antonio Machado et Juan Jamón Jiménez […] Le second est Prix Nobel de littérature, grand poète troublé par sa terrible exaltation du moi, écorché par la réalité qui l’environne, incroyablement aux aguets de la moindre perception, déchiré par des riens, au point que son exceptionnelle et merveilleuse âme de poète le rend ennemi de lui-même. Dans Platero et moi, Juan Jamón Jiménez livre une vision de Moguer, son village natal. Le récit, dans son intention, sa tonalité aussi bien que dans sa forme, s’apparente au Petit Prince de Saint-Exupéry. Au fil d’un voyage initiatique d’une lumineuse présence, le narrateur entreprend d’emmener le lecteur sur les chemins de ce petit village d’Andalousie, en compagnie de son âne Platero. Ces textes sont de véritables nourritures : comportant différents niveaux de lectures, passant par plusieurs seuils, ils nous entraînent vers une gradation de profondeurs, à l’image de ces «traboules» rayonnantes de la ville aux deux fleuves, pleins de détours, de cours, d’îlots d’habitations aux multiples accès où il fait bon se perdre. L’âme d’un village, quand il nous habite, comment la définir ? ainsi « l’âme de Moguer c’était le vin (…) Non, l’âme de Moguer c’est le pain. Moguer est comme un pain de froment, blanc à l’intérieur comme de la mie, et doré autour — oh soleil qui brunit ! — comme la tendre croûte. »
Existe-t-il des traboules à Moguer, pour jouer avec les illusions du réel, et nous approcher du coeur insaisissable des choses?
Sylvie-E. Saliceti
Moguer
Auteur : Juan Ramón Jiménez
Interprétation : Estrella Morente
Guitares : José Carbonell Montoyita / Alfredo Lagos