Les frères de la foudre, arrière-pays australien, anciennes peintures aborigènes.
Atahualpa Yupanqui est un chanteur, guitariste et grand poète argentin né en 1908 dans la région de Buenos Aires, mort le 23 mai 1992 à Nîmes. Ce poème dont il signe aussi la musique, est ici interprété par un duo réunissant Bïa et Lhasa de Sela. Trois talents rares en somme se conjuguent dans cette version de la chanson, reprise par ailleurs une dizaine de fois.
Sur ce qui fait l’essence artistique d’Atahualpa Yupanqui, notons cette phrase lue dans La palabra sagrada, bouleversante par son effet miroir, renvoyant à tout poète l’image exacte de son propre rapport à la poésie dès lors que cette dernière tient une place essentielle dans sa vie : « Je suis un chanteur d’arts oubliés, qui parcourt le monde pour que personne n’oublie ce qui est inoubliable : la poésie et la musique traditionnelle [d’Argentine]. Un désir profond existe en moi : être un jour la trace d’une ombre, sans aucune image et sans histoire. Être seulement l’écho d’un chant, à peine un accord qui rappelle à ses frères la liberté de l’esprit ».
Sylvie-E. Saliceti
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LOS HERMANOS / LES FRÈRES
J’ai tant de frères,
Que je ne peux les compter,
Dans la vallée, la montagne,
Sur la plaine et sur les mers.
Chacun avec ses peines,
Avec ses rêves chacun,
Avec l’espoir devant,
Avec derrière les souvenirs.
J’ai tant de frères,
Que je ne peux les compter.
Des mains chaleureuses,
De leur amitié,
Avec une prière pour prier,
Et une complainte pour pleurer.
Avec un horizon ouvert,
Qui toujours est plus loin,
Et cette force pour le chercher
Avec obstination et volonté.
Quand il semble au plus près
C’est alors qu’il s’éloigne le plus.
J’ai tant de frères,
Que je ne peux les compter.
Et ainsi nous allons toujours
Marqués de solitude,
Nous nous perdons par le monde,
Nous nous retrouvons toujours.
Et ainsi nous nous reconnaissons
Le même regard lointain,
Et les refrains que nous mordons,
Semences d’immensité.
Et ainsi nous allons toujours,
Marqués de solitude,
Et en nous nous portons nos morts
Pour que personne ne reste en arrière.
J’ai tant de frères,
Que je ne peux les compter,
Et une fiancée très belle
Qui s’appelle liberté.
Traduction française : Jean-Yves Sarrat
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LOS HERMANOS/ LES FRÈRES
Yo tengo tantos hermanos
Que no los puedo contar
En el valle, la montaña
En la pampa y en el mar
Cada cual con sus trabajos
Con sus sueños, cada cual
Con la esperanza adelante
Con los recuerdos detrás
Yo tengo tantos hermanos
Que no los puedo contar
Gente de mano caliente
Por eso de la amistad
Con uno lloro, pa llorarlo
Con un rezo pa rezar
Con un horizonte abierto
Que siempre está más allá
Y esa fuerza pa buscarlo
Con tesón y voluntad
Cuando parece más cerca
Es cuando se aleja más
Yo tengo tantos hermanos
Que no los puedo contar
Y así seguimos andando
Curtidos de soledad
Nos perdemos por el mundo
Nos volvemos a encontrar
Y así nos reconocemos
Por el lejano mirar
Por la copla que mordemos
Semilla de inmensidad
Y así, seguimos andando
Curtidos de soledad
Y en nosotros nuestros muertos
Pa que nadie quede atrás
Yo tengo tantos hermanos
Que no los puedo contar
Y una hermana muy hermosa
Que se llama ¡ libertad!
Atahualpa Yupanqui
Los Hermanos
Les frères
Auteur et compositeur : Atahualpa Yupanki
Interprètes : Bïa et Lhasa de Sela
Traduction française : Jean-Yves Sarrat
Extrait du lancement de l’album Nocturno (Mars 2008)