UNE CONSCIENCE EN FLEUR POUR AUTRUI
Ma joie est de savoir que tu es moi
et que moi je suis fortement toi.
Tu sais que ton froid dessèche mes os
et que mon chaud vivifie tes veines.
Ma peur fait trembler tes yeux
et ta faim fait pâlir ma bouche.
Sans ta force d’être un feu libre
ma conscience serait plus seule
que la terre morte d’un désert.
Ma vie offre des clefs émerveillées
à la perception de ta propre essence.
Lorsque tu veilles sur ma liberté
tu donnes un ciel et des ailes
au mouvement de mon espérance.
Mon désir d’être heureux, s’il cessait
un instant de compter avec le tien
tomberait aussitôt en poussière.
Quand tu saignes au couteau mon identité
nos consciences vont ensemble à l’abattoir.
René Depestre, En état de poésie ( Petite sirène), Les éditeurs français réunis, Éd. numérique, 2012, p.28.