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[Marseille] Léo Ferré

 

 

 

Cathédrale de La Major depuis l’esplanade du Mucem & Fresque murale quartier du Panier
Photographies Sylvie-E. Saliceti 01 11 2022

 

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Marseille
Léo Ferré

 

 

Ô Marseille on dirait que ta voix a changé
On dirait que la carte où partait l’Indochine
En se prenant pour toi dans le riz délavé
Te pleure avec du sang et puis l’âme marine

Ô Marseille on dirait que la mer a pleuré
Tes mots qui dans la rue se prenaient par la taille
Et qui n’ont plus la même ardeur à se percher
Aux lèvres de tes gens que la tristesse empaille

Ô Marseille on dirait que Notre Dame en fleurs
S’est penchée dans le port pour boire à ton eau verte
Qu’elle voyait briller comme brillent les pleurs
Aux yeux de tes marins que l’absinthe déserte

Ô Marseille on dirait que le vent t’a vaincue
Dans la miséricorde où la vallée le traîne
Et que de ce mistral qui glace ta vertu
Il ne reste qu’un peu d’accent qui se promène

Ô Marseille la vie a porté sur ton dos
Tout ce Nord qui proteste en moquant la musique
Qui monte de ta gorge accrochée à tes mots
Les mêmes que là-haut dans les steppes plastiques

Ô Marseille on dirait que flottent des drapeaux
Qu’une voile impudique a fauché dans des voiles
Et ces bateaux perdus qui croisent sous ta peau
Se souviennent de toi dans la gorge des squales

Ô Marseille on dirait que les saisons se noient
Dans ton ciel portuaire où la lune s’affaire
A compter les bateaux qui lui parlent de toi
Jusqu’aux galions perdus qui se croient nucléaires

Ô Marseille on dirait que le Peuple et le Roi
Ne savaient plus quoi dire et ne savaient que faire
Quand bouillait la colère et quatre-vingt-neuf fois
Ils ont mis sur ton nom une chanson-misère

Ô Marseille on dirait que Shakespeare a l’accent
Qu’il a quitté son Angleterre et ses manières
Qu’il t’apporte une rose et Joliette dedans
Avec des Roméo grimpant des cannebières

Ô Marseille on dirait que le coeur te va bien
Comme te l’écrivait Guillaume Apollinaire
« Anges frais débarqués à Marseille hier matin »
On débarque toujours les amours passagères

Mais qu’importe ton ciel qui se prend pour l’Orient
Qu’importe ton parler avec ses mots épiques
Ces mots qui sortent faire un tour avec l’accent
Ces mots qui ne sortent pas de Polytechnique
Oui mais quels mots, Marseille…

Quand tu y mets ta musique !

 

 

 

 

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