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[Plage du Prophète à Marseille] Izzo par Gianmaria Testa

 

                         Jean Triolet – Marseille

 

Voici un disque de collaboration entre Gianmaria Testa, musicien – chanteur, et le poète – guitariste Pier Mario Giovannone. Il valzer di un giorno est un album paru chez Harmonia Mundi, en octobre 2000, fort du souvenir encore très présent de l’écrivain Jean-Claude Izzo, disparu le 26 janvier 2000 à Marseille.

Quelques jours avant sa mort — exactement le 7 janvier — Jean-Claude Izzo adressait par télécopie à son ami le chanteur Gianmaria Testa, un poème commençant ainsi : Plage du Prophète, à Marseille / ils se sont arrêtés / D’abord la fille aux yeux gris verts / des mers du Nord / et au sourire mûri sur les berges du Nil / L’ami ensuite/le poète des Hauts Pays … Il y a une émotion certaine quand on sait qu’il s’agit là probablement des mots ultimes, ceux que le poète écrit dans ce moment où il porte ses pas vers le soleil couchant .

Ce soir-là  — celui décrit dans le poème  — ce soir du 7 janvier 2000 où il se trouvait face à la mer, Izzo fut-il traversé à nouveau par les mots de Solea ? « J’étais parti marcher vers les calanques. J’avais senti le besoin de laver ma tête à la beauté de ce pays (…) de la remplir d’images sublimes. Besoin aussi de donner un peu d’air pur à mes pauvres poumons. J’étais parti du port de Calelongue, à deux pas des Goudes. Une balade facile, de deux heures à peine, par le sentier des douanes. Et qui offrait de magnifiques points de vue sur l’archipel de Riou et le versant sud des calanques. Arrivé au Plan des Cailles, j’avais tiré à flanc, non loin de la mer, dans les bois au-dessus de la calanque des Queyrons. Suant et soufflant comme un pauvre diable. J’avais fait une halte au bout du sentier en corniche qui surplombe la calanque de Podestat.

J’étais bien, là, face à la mer. Dans le silence. Ici, il n’y avait rien à comprendre, rien à savoir. Tout se donnait aux yeux dans l’instant où l’on en jouissait.»

Au funérarium de Marseille furent joués les airs que le poète avait choisis, notamment Solea de Miles Davis, puis une chanson de Roberto Murolo souvent fredonnée par le père d’Izzo — ce père qui lui avait laissé l’héritage d’une phrase à la valeur inestimable dans Chourmo : Si on a du cœur,  on ne peut rien perdre où que l’on aille, on ne peut que trouver.

Au cimetière Saint Pierre, on entendit aussi plusieurs chansons de l’ami Gianmaria Testa.

Marchons encore aux côtés du poète, le temps de quelques pas sur la plage du prophète à Marseille, dans ce texte d’Izzo que Gianmaria Testa a choisi pour clore son disque Il Valzer di un giorno.

 

Sylvie-E. Saliceti

 

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Plage du Prophète
Auteur : Jean-Claude Izzo
Compositeur, interprète : Gianmaria Testa

 

Plage du Prophète

Plage du Prophète, à Marseille
ils se sont arrêtés.

D’abord la fille aux yeux gris verts
des mers du Nord
et au sourire mûri sur les berges du Nil
L’ami ensuite
le poète des Hauts Pays
attentif aux murmures des passeurs
sur les sentiers arides des exils
Le plus âgé enfin
homme aux semelles de vent
tantôt Afghan, tantôt Mongol
porté par des mondes d’hier entrevus

Plage du Prophète
ils ont porté leurs pas
vers le soleil couchant

Une vague est venue lécher leurs pieds
Bénédiction du Prophète
Prophète anonyme
de ceux qui croient
aux vérités de la beauté.

Plage du Prophète
Du Prophète

Jean-Claude Izzo
7 janvier 2000

 

 

 

 

 

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