Ce qui relie la musique d’Ieva Baltmiskyte à la poésie de ce recueil signé Anna Ayanoglou ? C’est la géographie baltique d’abord. Du Fil des traversées, son éditeur dit qu’il puise en Europe baltique la matière de ses poèmes, où Anna Ayanoglou a voyagé . « Un monde de rues désertes «noyées sous le feuillage», aux instants discrets, gardant l’écho lointain des tragédies du XXe siècle. Le «familier» que scrute Anna Ayanoglou court «dans les venelles, dans les cours comme dans des greniers défendus». C’est aussi dans la suite des années, l’expérience de la dissolution amoureuse, celle d’un chemin de vie pas à pas ressaisi dans la parole du poème que l’auteure compose aujourd’hui son propre chant. Pour ce premier recueil, Anna Ayanoglou a clairement choisi le camp du poème, seul capable d’enregistrer les subtilités perdues, sans nostalgie. L’auteure fait entendre ici une petite musique très singulière, loin des artifices de mode, fidèle plutôt à sa chanson intime». Musique donc, qui répond à celle d’Ieva Baltmiskyte, la guitariste lituanienne . Diplômée de l’Académie lituanienne de musique et de théâtre et du Conservatoire royal de Bruxelles, elle s’est intéressée à l’authenticité de la performance, ce qui l’a amenée à mettre en œuvre différents instruments historiques dans ses concerts. Elle se produit souvent « sur des luths Renaissance ou baroques, des guitares lyres et des guitares classiques. Ieva Baltmiskyte s’intéresse également à la musique contemporaine, dans laquelle elle inclut ses propres arrangements et compositions, présentant souvent des motifs de musique baltique comme reflet de son origine».
Musique du texte, musique des instruments à cordes : un beau travail d’une part et de l’autre de la création artistique, où chaque artiste répond à l’autre.
Sylvie-E. Saliceti
LE FIL DES TRAVERSÉES
De ces années parfois en rêve
quelque chose me revient
Il y a toujours un départ
bercé d’incertitude et d’une étrange douceur
c’est l’aube, le crépuscule
toujours la fin et le début
mais je ne sais pas de quoi –
simplement que je dois
prendre place dans le bus qui s’en va
plein de passagers tièdes, ensommeillés –
que le bus, celui-là, trouvera mon chemin.
Anna Ayanoglou, Le fil des traversées, poèmes, Gallimard, 2019, Édition num. non pag.
Chaconne
Compositeur : Robert de Visée
Théorbe : Ieva Baltmiskyte